Quand on arrive au vignoble Stratus, à Niagara-on-the-Lake, en Ontario, on comprend qu’ici, rien n’est laissé au hasard. Le design impressionnant de la boutique en salle d’accueil nous indique immédiatement qu’aucun détail n’est et ne sera négligé. Les lieux sont tellement beaux et épurés, ont doit s’attendre à cela dans les vins. Dès le départ, il m’est venu en tête une phrase de Jean de la Fontaine dans la fable Le corbeau et le renard : « Sans mentir, si votre ramage se rapporte à votre plumage, vous êtes le phénix des hôtes de ces bois ». Je ne serai pas déçue.

Il faut d’abord rencontrer l’œnologue en chef Jean-Laurent Groux, cet expatrié français qui a appris son métier en Bourgogne et à Bordeaux. Dès les premières minutes d’entretien avec le vinificateur, on comprend que la passion qui l’anime ne peut faire autrement que de se répercuter dans ses vins.« Non, nous ne sommes pas bios », explique-t-il en mettant les pieds dans la bâtisse. Il va ainsi au-devant de cette question d’agriculture qui semble le titiller. « Même si on le voulait, comme les autres vignobles autour ne le sont pas (voisin de Jackson Triggs), nous ne pourrions obtenir notre certification » explique-t-il. « Soyez assurés que nous agissons de manière biologique, mais que nous ne pouvons l’être sur papier».

Il faut dire que le vigneron a une vision très naturelle du vin. Pour lui, il faut le moins de manipulation possible entre la vigne et le verre. Les installations de production sont d’ailleurs placées du haut vers le bas de la bâtisse afin que le liquide, dès son foulage ou son pressage, commence une descente par gravité vers les prochaines étapes de production. Les lieux sont surprenants. Après avoir macéré, le vin va encore descendre pour sa fermentation alcoolique, puis son élevage en foudre ou en cuve avant de se retrouver sur le plancher des vaches dans les barils de chêne ou d’inox. Ici, on comprend que l’investissement n’est pas un problème.

Vu toutes les étapes de production et les soins jaloux que portent M. Groux et son équipe au précieux nectar, on comprend un peu mieux le prix des bouteilles qui peuvent, de prime abord, faire sursauter. Mais après avoir dégusté avec l’œnologue, plusieurs de ses vins, qu’il connaît par cœur, on réalise que le prix est relativement raisonnable. À qualité égale, des vins semblables venant de Californie ou de France, peuvent se détailler beaucoup plus chers. Alors oui, Stratus est un phénix de Niagara-on-the-Lake.

Voici donc mes notes de cette dégustation qui s’est déroulée dans une superbe salle vitrée et ensoleillée avec vue sur les vignes. Je sais, j’ai un super job !

Guylaine Lebel

Dégustation du 12 avril 2016

Stratus White 2012, 14,1%, 44 $ au vignoble

Assemblage : 43% Chardonnay, 42% Sauvignon blanc et 15 % Sémillon. Élevé 624 jours en barriques françaises.

Ce vin limpide et brillant, issu d’un millésime chaud et long, offre des arômes de bananes bien mûres au premier nez. Vient ensuite le citron. En bouche, ce vin bien rond et vif présente des saveurs de brioches. Il est d’une surprenante longueur. Il ferait le compagnon parfait d’un plat de pétoncles au bacon et au sirop d’érable.

Wildass, Sauvignon blanc 2013, 13,5%, 22,10 $ Code SAQ :  12455619

Ce vin jaune pâle, vendangé entre la mi-septembre et la mi-octobre de ce millésime frais et instable, offre des arômes variétaux très racés. Le buis et le pamplemousse occupent tout l’espace aromatique. Ça tombe bien quand l’on a envie d’un vrai Sauvignon blanc de style nouveau monde. Franc et vif, il est bien équilibré. Il laisse en bouche un peu de noix de coco.

Stratus Red, 2012, 13,8%, 46 $ au vignoble

Assemblage : 29% Cabernet Sauvignon, 26% Cabernet franc, 26% Merlot, 13% Petit Verdot, 3% Malbec, 3% Tannat.

Voici l’assemblage de ce millésime. Chez Stratus, la recette change tous les ans. L’idée est de faire le meilleur vin possible avec les conditions climatiques de l’année de vendange.

De couleur violacée, le vin est ici assez limpide. Un bon picotement au nez indique des arômes poivrés. Les fruits noirs, le poivron vert et la cerise complètent ce bouquet aromatique. En bouche, ce nez frais et sec offre une belle structure avec des tannins présents et encore fermes. Sa longueur est agréable. Ce vin peut vieillir encore au moins 5 ans. Idéalement, il pourrait se bonifier jusqu’à dix ou 15 ans. Quand ce jour viendra, je recommande de l’agneau en plat de résistance.

Wildass Red, 2011, 14%, 25,05 $ Code SAQ : 11601143

Assemblage : 31% Cabernet Franc, 28% Merlot, 15% Cabernet Sauvignon, 11% Syrah, 5% Tannat, 3% Petit Verdot, 3% Trempanillo, 1% Sangiovese.

Vin rouge clair, limpide qui présente une couleur orangée qui annonce une importante évolution malgré son âge. Déjà des notes de passage en fût de tabac s’ajoutent aux arômes de poivre, de champignon et de cerise. Ce vin sec, qui présente une légère douceur à l’attaque donne des saveurs de confitures de framboises. Ses tannins présents, mais souples font de ce vin une belle découverte. Il est prêt à boire. Je dirais qu’un osso buco bien tomaté lui rendrait justice.

Stratus, Cabernet Franc 2013, 13,5%, 38 $ au vignoble

Vin rouge clair et limpide aux teintes orangées. Peu aromatique, il laisse tout de même émaner certaines notes de chocolat mentholé. Vif et sec, il donne des saveurs de cerises rouges. Tannins souples et assez court en bouche. Il serait bien avec un magret de canard et une sauce aux petits fruits.

Stratus Sangiovese 2012, 13,8%, 42 $ au vignoble

Il est étonnant de pouvoir déguster un vin mono cépage de Sangiovese en Ontario. Pourtant Stratus a relevé le défi. Ce vin rouge violacé propose des arômes de feuilles d’automne. Ses tannins fermes font partie de ce vin assez chaud. Vin intéressant qui peut vieillir encore 5 ans. C’est le seul Sangiovese au pays.

Stratus Icewine, 2013, 13,8% 40,75 $ Code SAQ :  12718933

Cabernet franc, 133g/l sucre résiduel

Ce vin de glace élaboré avec du cabernet franc, du Cabernet Sauvignon, du Mourvèdre et de la Syrah propose des effluves de fraises bien mûres. En bouche, c’est le sucre d’orge et la pomme rouge qui ressortent de ce produit au sucre résiduel moins important que ce à quoi les générations précédentes de ce vin de glace nous avaient habituées. Il faut s’assurer de bien le servir froid. 8 degrés est l’idéal.